D’UNE AMIE DU COIN DE CARL (un extrait)
Carl, dis moi, qu’aimes tu vraiment de la vie ? Quel est ton secret pour être si plein d’entrain à cet âge certain?
Très cher amie,
Je serai long cette fois dans mes réflexions car cette question revient souvent sur le tapis, et je te répondrai au nom de tous les vieux avant moi, qui m’ont inspiré par leurs paroles et leurs écrits. Pour commencer, je te dirai candidement comme le poète, (tu le sais, je n’ai pas de secrets) j’aime la compagnie du genre féminin.
En automne j’aime faire voile pour le Nord et ainsi oublier la chaleur de la Floride. J’aime aller en voyage sans date fixe pour retourner. J’aime la vie entière et j’aime tout, spécifiquement le bon vin. J’ai en moi la joie de vivre considérant l’alternative.
Parfois, à Hollywood Beach, près d’une plage en Floride, j’aime m’asseoir en plein air et chanter aux quatres vents sans composer de chanson. Revivre les bons moments passés ici-bas et ainsi les renouveler dans l’imagination, et, si chanceux, les renouveler volontiers sur le vif.
Au soir de ma vie, j’aime le boléro et le danzon cubain ; c’est une bénédiction des dieux. En Haiti, en visite, j’aime une bonne canne à sucre quand je la trouve, un bon cigare et un verre de rhum en bonne compagnie.
La vieillesse, j’ai décidé, est un cadeau. Je suis probablement pour la première fois de ma vie là ou je voudrais être. Je ne parle pas du physique. Je suis parfois désespéré avec les rides, les yeux fatigués et un libido en chute libre. Souvent, en me regardant dans un miroir je ne reconnais pas ce vieux, mais je n’agonise pas la dessus pour longtemps.
Pour tout l’or du Pérou je ne changerais actuellement mes amis, ma vie, pour moins de cheveux blancs et un corps d’Adonis. En vieillissant je suis devenu plus généreux avec ma personne en la critiquant moins. Je suis devenu mon propre ami. J’ai droit à l’extravagance. J’ai vu trop d’amis laisser ce monde trop tôt, avant d’avoir compris la précieuse liberté qui vient avec l’âge.
Cela ne regarde personne si je décide de rester avec mon ordinateur jusqu’à quatre heures du matin, et dormir jusqu’à midi.
Je danserai parfois seul au son des rytmes du passé, et si en même temps je désire pleurer pour un amour perdu, je le ferai avec abandon.
J’irai à la plage avec un costume de bain un peu trop serré sur un corps gonflé, et je plongerai avidement dans la mer malgré les regards pitoyables des jeunes. Eux aussi, ils deviendront vieux.
J’oublie parfois, mais là encore c’est une bénédiction du ciel car il y a des choses dans cette vie qu’il vaut mieux oublier, et éventuellemnt je me souviens des choses importantes.
Certainement qu’au cours des ans j’ai eû le cur brisé. Comment peut-on ne pas avoir le cur brisé à la perte d’un enfant, ou quant un enfant souffre et même quant on perd un chien ou un chat frappé par une voiture ?
Mais un cur brisé c’est ce qui donne de la force, de la compréhension, de la compassion et de la tolérance. Un coeur qui n’a pas été brisé ne saura jamais la joie de son imperfection.
Je suis béni d’avoir vécu si longtemps et d’avoir acquis des cheveux blancs, d’avoir mes rire de jeunesse tous gravés sur le visage. Plusieurs n’ont jamais ri et d’autres sont morts avant que leurs cheveux blanchissent. Je peux dire « non », franchement et peux dire « oui », franchement.
En vieillissant c’est plus facile d’être positif. On paie moins d’attention à ce que les autres pensent. J’ai même acquis le droit d’avoir tort. J’aime être vieux. Cela m’a donné ma liberté. J’aime l’homme que je suis devenu. Je ne vais pas vivre indéfiniment, mais je ne perdrai pas mon temps à me lamenter de ce qui pourrait être ou m’inquiéter de l’avenir.
Pour jouir de la vie il faut-être de bonne foi, oublier les mauvais moments et les petits hommes, et vogue la galère ! « Que sera, sera. »
Je t’embrasse, Carl
À ma mort, jusqu’à mes cendres on ne les aura pas.
Myriam Nader à l’endroit de Carl,
Good morning Don Carlito,
I am so glad to be able to receive your today’s CDC! I enjoyed reading your interview in Destination Soleil . Your following sentences caught my special attention:
Un coeur qui n’a pas été brisé ne saura jamais la joie de son imperfection….
À ma mort, jusqu’à mes cendres on ne les aura pas….
La vieillesse, j’ai décidé, est un cadeau….
Je suis béni d’avoir vécu si longtemps et d’avoir acquis des cheveux blancs, d’avoir mes rires de jeunesse tous gravés sur le visage…
En vieillissant c’est plus facile d’être positif. On paie moins d’attention à ce que les autres pensent. J’ai même acquis le droit d’avoir tort…
I personally think that you are among one of the few on earth to realize his blessings in life. You are fortunate enough to have the capacity to adapt and take life by its horns. Your experiences in the journeys of your life has made you a very wise man! Keep up the good spirit and you will never die old! After all, old age is a mental state! (Smile!)
All the Best,
Myriam
GALERIE D’ART NADER