HENRY DELVA…SIMPLES COMMENTAIRES!
Reçu du Coin de Carl
Los Angeles, Californie
SIMPLES COMMENTAIRES
Mon cher Carl,
Je viens de revoir le charmant documentaire sur DVD de la vie d’Issa Saieh que m’a gracieusement envoyé Frantz Voltaire, après ta présentation sur le Maestro Issa El Saieh le 21 mai 2009 dernier, à l’église United Church of Christ, Coral Gables, Floride.
Issa Saieh fut un monument de la musique haitienne et il y consacra sa vie. Frantz Voltaire fit montre de son talent en nous offrant les scènes filmées d’une Haiti que les moins de cinquante ans ignorent. Fanfan, par son goût et son choix des artists présentés nous laisse entrevoir son âme de cinéaste qui fouille avec une précision d’orfèvre dans nos archives et arrive à projeter des prises de vue d’une extraordinaite beauté.
J’ai beaucoup aimé les commentaires de Raoul Guillaune qui a su nous faire revivre cette joyeuse époque en énumerant les bistros, boîtes de nuit et le Théatre de Verdure où le talent des artistes étrangers ajoutait une note agréable à notre joie de vivre. N’oublions pas de citer le VERT GALANT, le célèbre restaurant-night club des années 50 situé sur le boulevard Harry Truman.
Après le VERT GALANT, sur une route bordée par des amandiers imposants, de Martissant à Carrefour, c’était le commencement d’une autre zone remarquable par des établissements offrant le service de prostituées, ou les goûts les plus érotiques étaient promis d’être satisfaits. Une clientèle avide et crédule allait y chercher des sensations fortes frustrée par la banale existence de chaque jour. LA FRONTIÈRE, comme ces bordels étaient appellés, était le haut lieu où les différentes classes sociales et professionnelles se réunissaient en franche camaraderie. Il arrivait parfois que des prélats s’y trouvaient pour quelques étreintes hâtives et clandestines connues sous le nom de soutane en feu, superbe égarement éclésiastique des sens.
Plusieurs de ces cafés offraient une ambiance ou parler l’espagnol etait de mise, si pas obligatoire. D’autres avaient ce qu’il fallait pour satisfaire une clientèle purement nationale. Le CABARET ROYAL était le paradis des plus âgés à la recherche d’une meilleure vaillance que le plat légitime, présentement sans épices, ne procurait plus. MARIE-THÉRÈSE PIEDS FINS se fit une renommée avec ceux qui cherchaient une consolation pour leur virilité agonisante.
Sous l’ombre d’un amandier majestueux, l’ASTORIA BAR était le refuge des bourgeois de tout âge. Un peu plus loin se trouvait un coquet petit bar dont la propriétaire, Prospera, était la maitresse d’un dentiste de la haute société. Je cite seulement ces trois établissements qui étaient les lupanars d’envergure et le sommet de l’amour tariffé.
Voici donc une phase authentique de la vie Port-au-Princienne ignorée par nos historiens. Quelle erreur! Ce genre de vie était pour nous ce que le golf est pour les américains car beaucoup d’affaires, tant commerciales que politiques, furent conclues sur le terrain de nos bordels.
Hélas! j’écoutais avec plaisir les farfelus obssédés d’arithmétique érotique raconter leurs prouesses car il était de bon ton d’énumérer leurs élans nocturnes.C’était l’apogée et aussi le déclin d’une époque. Je plaide coupable et je connaissais comme les autres les frémissantes émotions de l’adultère, ironiquement en me trompant moi-même.
Vois tu mon cher Carl, c’est au crépuscule de ma vie que ces souvenirs d’une jeunesse volage et insouciante me reviennent et je ressens encore le trésaillement de mes premiers frissons.
Miracle de l’évocation.
Accolade mon cher f
