La situation dégénère en Guadeloupe!
Agence France-Presse
Pointe-à-Pitre
Un homme a été tué par balle dans la nuit de mardi à mercredi en Guadeloupe, où la grève générale entamée il y a un mois dégénère en émeutes, malgré les appels au calme du gouvernement et des syndicats.
La victime, un syndicaliste d’une cinquantaine d’années qui revenait d’un piquet de grève n’a pas été atteint par une balle perdue, a affirmé mercredi le procureur de Pointe-à-Pitre, Jean-Michel Prêtre. Il a exclu un tir des forces de l’ordre.
Le procureur n’a pas exclu l’hypothèse selon laquelle, compte-tenu de leur âge, la victime et son passager auraient pu être confondus avec des policiers circulant en voiture banalisée par les bandes de jeunes qui tenaient les barricades, un quartier sensible de Pointe-à-Pitre.
Il s’agit du premier mort du conflit social qui paralyse l’île antillaise depuis le 20 janvier, et qui s’aggrave de jour en jour.
Selon les autorités, plusieurs coups de feu ont été tirés au cours de la nuit par des manifestants, blessant légèrement six membres des forces de l’ordre.
Des magasins ont été pillés à Pointe-à-Pitre, principale agglomération, et dans d’autres localités, et des barrages érigés dans les rues désertées par les habitants.
Trois policiers ont été légèrement blessés par des tirs d’armes à feu dans une cité de Pointe-à-Pitre alors qu’il accompagnaient des pompiers venus porter secours au syndicaliste.
A Baie-Mahault (10 km de Pointe-à-Pitre), des jeunes armés de fusils à pompe ont tiré à balles réelles en direction des forces de l’ordre et trois gendarmes ont été légèrement blessés.
Face à cette flambée de violences, le premier ministre François Fillon a appelé «à la responsabilité de tous les acteurs pour que cesse cette violence qui traumatise toute la Guadeloupe».
Le «collectif contre l’exploitation» (LKP), fer de lance de la grève générale, et le gouvernement ont lancé des «appels au calme».
Le secrétaire d’État à l’Outre-mer Yves Jégo a envisagé un accord salarial en «fin de semaine» assurant que «les médiateurs travaillent en coulisse».
Le LKP, qui réclame une hausse de 200 euros des bas salaires, accuse le gouvernement d’être revenu sur un engagement à compenser, par des baisses de charges, cette augmentation salariale.
La grève a cristallisé un profond malaise économique et social, mais aussi des tensions entre la minorité blanche et la population noire, sur un fond historique marqué par l’esclavage.
Plusieurs magasins et entreprises appartenant à des familles blanches, les «békés» (descendants de colons), ont notamment été pillés.
Le président Nicolas Sarkozy, longtemps resté silencieux, doit recevoir jeudi à Paris des élus de Guadeloupe et Martinique.
La dirigeante du parti socialiste, Martine Aubry, a exhorté mercredi le chef de l’État à s’«intéresser» aux départements d’outre-mer.
«Depuis deux ans, on ne s’est pas occupé des départements d’outre-mer (…) L’État n’a pas rempli son rôle de contrôle des prix», a-t-elle déclaré.
Le conflit en Guadeloupe mais aussi en Martinique, l’autre île française touchée par la grève depuis le 5 février, a pour première cause la cherté de la vie, alors que le taux de chômage est le plus élevé de l’Union européenne et le PIB par tête deux fois inférieur à la métropole.