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Pas moyen de vivre en paix
On est trop gros, on se nourrit mal, il faut changer nos habitudes alimentaires, changer de régime de vie. Je veux bien. Je suis pleine de bonne volonté, mais je surveille quoi au juste? Je mange quoi? Je fais quoi?
Il ne se passe pas une semaine sans qu’on nous annonce un nouveau virus, une nouvelle maladie et aucun vaccin pour rien contrôler. Plus ça va, plus on nous fait peur et affirme que tout ce qu’on fait nous conduit directement au repos final. C’est à devenir fou.
C’est déprimant. Mieux vaut mourir avant de perdre les pédales. C’est devenu plate à mort et les banques devront fermer leurs portes. Plus personne voudra investir dans des fonds de retraite, tout le monde aura envie de crever. A quoi ça sert d’investir dans un avenir qui semble tellement ennuyeux?
Pas de buf, c’est la maladie de la vache folle, attention à la volaille, c’est la grippe aviaire. Allez-y doucement avec le poisson, c’est bourré de mercure. Trop d’iode dans les fruits de mer, trop de pesticides sur les fruits et les légumes. Pas trop d’ufs à cause du cholestérol et attention au sucre, faut surveiller son taux de diabète.
Tenez-vous loin du fast food, des boissons gazeuses, de la pasta, ça fait engraisser, c’est bourré de sucre et, tout le monde le sait, la farine blanche est hyper néfaste pour la santé. Ne buvez pas d’eau du robinet, trop de chlore et, attention au sodium, c’est pas bon pour la santé. Eliminez le gras et le beurre de votre alimentation, pensez aux lipides, et allez-y mollo avec les légumineuses. Protégez vos intestins et n’oubliez jamais que les produits laitiers viennent des vaches.
Dès qu’on prépare un menu, il faut penser à tout : embonpoint, cholestérol, triglycérides, intestins, cur, poumons, cellulite, lipidesm allergies, mercure Dès qu’on passe à table, on a déjà pris un gros risque et sans doute hypothéqué notre santé.
Tout va bien, au chapitre de l’alimentation. On ne sera jamais malade, on a tout éliminé. C’est la diète forcée, on ne mange plus rien. On pourrait manger bio, mais ça coûte la peau des fesses. Comme toutes les modes, c’est dix fois trop cher.
Ne passez pas trop de temps devant votre ordinateur ou la télé. Bougez, c’est la santé. L’obésité vous guette et c’est le mal du siècle. Les petites poignées d’amour, c’est pour pour le conjoint, les autres ne veulent rien savoir de vos bourrelets disgracieux.
Allez grouille, maigris au plus vite ! C’est inadmissible d’être gros en 2006. La vie n’est pas faite pour les obèses
Avez-vous encore le goût de faire du jogging quand vous n’avez rien mangé parce que tout est mauvais pour l’humain que vous êtes? Avez-vous encore le goût de vivre si déjà, vous devez vous comporter comme si vous étiez deux fois centenaire et deviez oublier tous les petits plaisirs de la vie?
Moi non ! L’avenir ne m’intéresse pas du tout s’il est déjà du passé. Vivre aussi encadré, pour moi, c’est revenir 100 ans en arrière. Pas certaine que ça me plaise.
Et les restrictions continuent.
Arrêtez de boire avant de devenir alcoolique, de fumer avant d’avoir un cancer du poumon ou de vous ruiner et surtout, n’allez pas nulle part, la fumée secondaire dérange et est tout aussi nocive que la cigarette elle-même. N’utilisez pas de pesticides dans votre jardin, laissez les moustiques vous dévorer tout rond et grattez-vous à mort.
Couchez-vous tôt pour un bon sommeil réparateur et surtout pour oublier que, hier encore, on pouvait vivre sans se culpabiliser. C’était le bon temps.
J’oubliais le plus important. Ne sortez jamais sans condom le HIV et les MTS n’attendent que vous pour continuer le party, et gérez bien votre stress avant de faire un burn-out, une maladie sournoise très populaire.
Diable que la vie est belle ! Même si on ne va plus au soleil à cause des cancers de peau, qu’on ne sort pas l’hiver à cause de froid, qu’on reste à l’air climatisé l’été à cause de la chaleur. Tout n’est qu’une question de perspective.
Bon ben coudonc ! On ne mange plus, on ne boit plus, on ne fume plus et on ne baise plus. A droite tout le monde, c’est ça l’avenir.
On peux-tu respirer et poursuivre notre petit bonhomme de chemin sans se faire dire quoi faire ou quoi manger tous les jours? On peux-tu juste flâner sur une terrasse sans penser qu’on peut crever demain?