Les fleurs sont au menu des grandes recettes et plusieurs restos les ont mises en vedette. Sans doute pour suivre une mode insignifiante, la rose rebondit dans notre assiette au même titre que les salsifis.
Une petite capucine traînant parmi les pommes de terre, un illet avec les navets, une tulipe avec le prime rib, une pensée au milieu des petits pois, un glaïeul avec les épis de maïs, des pissenlits dans la salade, des clématites au dessert, des lys avec le barbecue, des roses dans la confiture de fraises, des camélias avec la tisane, une orchidée avec la tarte aux pommes.
Un peu ridicule à mes yeux. C’est d’un snobisme indescriptible cette histoire de fleurs comme mets d’accompagnement. Je n’embarque pas dans cette mode et je ne suis pas certaine que les fleurs possèdent toutes les valeurs nutritives nécessaires à ma survie. On aura beau me dire que les fleurs ne sont pas toxiques, durant des années, on nous a raconté que la cire sur les pommes ne l’était pas et voilà qu’on change d’idée. Elle est très toxique.
La preuve flagrante qu’on ne peut jamais se fier ce que nous disent nos élus.
Qu’on décore mon assiette d’une rose rouge à côté de mon prime rib au resto, je veux bien quoi que ca me crève le cur de la voir terminer sa vie aussi bêtement, mais qu’on me dise qu’elle est comestible m’embête un peu. Je préférerais de loin qu’on m’offre la rose en guise d’amour ou d’amitié plutôt que de la voir se faner dans mon assiette terminée en cinq minutes.
Sérieusement, qui a envie de manger des fleurs? Qui peut se contenter de quelques pissenlits ou des petites capucines avec ses sauterelles grillées et son buf en croûte?. Apportez-moi une belle assiette garnie de beaux légumes frais, pas de fleurs fanées. Ca ne m’intéresse pas du tout. Même que ça m’insulte. Un hibiscus en guise de petit déjeuner, très peu pour moi merci. J’aime encore mieux mon jus d’orange.
Paraît-il que pour manger des fleurs, il faut les cultiver soi-même à partir de graines comestibles. Mais pourquoi je m’évertuerais à cultiver des fleurs pour ensuite les manger au lieu de les admirer? Le fleurs nous ravissent par leur beauté et doivent nourrir une âme, pas un corps qui peut absorber à peu près n’importe quoi et qui en redemandera toujours jusqu’à sa mort.
Au nom de quel diktat de la mode je mangerais des fleurs alors que les légumes sont si bons? La capucine ne remplacera jamais la belle tomate rouge et mûre à mes yeux. Me semble qu’il y a une différence bien nette entre horticulture et agriculture, entre jardin et potager.
Mais à ma remarque l’autre soir, alors que le fleurs étaient au menu, on m’a dit que je manquais de raffinement, que je n’étais pas sortie de mon patelin. Même après avoir fait la moitié du globe et vécu à différents endroits.
C’est peut-être vrai que je suis toujours dans mon patelin, mais au moins, je n’ai pas la prétention de sortir de la cuisse de Jupiter et je n’ai pas une once de snobisme en moi. J’étais tellement insultée que je l’ai envoyé péter dans les fleurs comme quand on était enfants.
A bout d’arguments, avec un fort accent québécois, j’ai lancé « Pis mange donc… des fleurs » (pour ne pas dire autre chose) et je suis sortie du resto laissant ce chum de passage, et en plan, et avec l’addition, sans aucun remords.
Ca lui apprendra à m’insulter.
S’il avait au moins eu la décence de me dire que les fleurs avaient des vertus amaigrissantes, j’aurais mangé tout mon jardin avec plaisir et gourmandise en arrivant à la maison.
Mais non ! Ma plate-bande est plus belle que jamais.