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Beethova Obas : « La jeunesse haïtienne peut changer les choses »


Beethova Obas

Vous rêvez d’un lendemain où les enfants des rues accèdent à la scolarisation et à la dignité. Comment menez-vous le combat pour Haïti ?
Le combat est littéraire, J’ai écrit des textes. Ce combat est magnifié par le talent qui m’a été donné. Il faut toujours lier la parole à l’acte. Nous avons créé une association avec ma femme et des amis belges, Investissement For the Futur. C’est une association qui a pour objectif d’encadrer des jeunes financièrement. Dans le nouvel album, Futur, j’ai sorti un titre, La Vie, qui parle du futur. Un single a été imprimé spécialement avec ce titre pour être un soutien financier de l’association. Le produit de la vente du single va à l’association qui vient en aide aux enfants orphelins d’Haïti. Nous avons en charge deux orphelinats. mais, ce n’est pas fini.

Éveiller la conscience politique de chaque citoyen, passer en dérision les politiciens véreux… C’est ce que vous faites dans vos textes. Pensez-vous que Martelly puisse faire bouger les lignes ?
Tout dépendra de l’avenir. Je ne peux pas faire ici encore une analyse sur ce tout jeune gouvernement. Penser que Marthély peut faire quelque chose dépendra en fait de ceux qu’il aura choisis pour l’accompagner dans sa démarche politique. Il est certain que la situation est telle que faire bouger les choses en Haïti dépendra de tellement de facteurs que ce ne sera pas une mince affaire. Je reconnais de grandes qualités à l’artiste Martelly. Quant au politique, il faut attendre en n’oubliant jamais qu’il ne pourra rien faire s’il n’a pas l’appui du peuple haïtien.

Un des problèmes d’Haïti, c’est la présence d’ONG dont les membres ne connaissent pas la culture d’Haïti, la langue créole. Un ami de retour d’Haïti soutient que les ONG ne font pas grand-chose. Qu’il faudrait laisser faire les associations de quartiers…
Haïti a traversé une grande crise depuis cinquante ans. Il est certain que les ONG n’ont jamais changé la situation du monde. Regardez en Afrique ! Je crois qu’Haïti souffre du probème des ONG. Mais aussi d’une politique étrangère injuste. Les pays soi-disant amis ou alliés n’ont pas encore compris Haïti. Ils n’investissent pas vraiment pour qu’il y ait un changement. Les ONG ne vont rien changer. Ce sont les Haïtiens de la nouvelle génération qui peuvent changer les choses.

« Brayna n’arrête pas de me poser des questions sur le monde. »

Il est scandaleux de voir que les jeunes haïtiens ne peuvent bénéficier de l’éducation parce que les écoles sont payantes !
Sur la plupart de mes albums, je parle de ce scandale. En 1992, déjà. Dans mon album récemment sorti des presses, Futur, je redis la même chose. J’ai toujours comparé un enfant à un ordinateur. Si on ne lui donne pas les informations, il ne sera pas utile à la société. L’enfant arrive nu au monde, il faut lui donner de l’information, l’éduquer, le former. Mais il faut le faire gratuitement. Comme dans tous les pays modernes.

Papa d’une petite fille qui pose beaucoup de questions, quel message souhaitez-vous transmettre à tous les enfants du monde ?
Je suis effectivement papa d’une petite fille, Brayna. Elle n’arrête pas de me poser des questions sur le monde. Je voudrais, comme à tous les enfants du monde, lui inculquer le respect des autres. Il faut apprendre à les écouter, être assidue. Avoir l’amour de la connaissance. Des choses et des autres.

« Pour le titre Yo, tout s’est fait simplement. »

Vous vous êtes rendu en Pologne pour y enregistrer des violons avec l’orchestre philharmonique de Wroclaw. Les sonorités du violon représentent beaucoup dans votre imaginaire, n’est-ce pas ?
Moi, mon instrument de prédilection, celui avec lequel je compose ma musique, c’est la guitare. Cependant, le violon me parle. C’est un instrument qui me permet d’embellir, d’amener une autre couleur à ma musique. Le violon permet de donner encore plus d’harmonie à ma musique. Il y a deux messages dans cette utilisation du violon. La première c’est que j’ai enregistré ces violons en Pologne. Or, il y a une histoire commune entre Haïti et la Pologne. Des Polonais ont débarqué avec l’armée de Napoléon Bonaparte pour réprimer les révoltes d’esclaves en Haïti. Ils ont compris le combat de ceux-ci et les ont rejoints dans leur lutte. Ce qui me les rend d’emblée sympathiques. Et comme vous le savez il y a beaucoup de Polonais qui ont fondé des familles, au fil des siècles, en Guadeloupe et en Martinique ! Et puis, les violonistes polonais sont certainement les meilleurs au monde !

Dans Futur, vous rendez un hommage aux travailleurs et aux boat people haïtiens à travers un titre, Yo, sur un texte de Patrick Chamoiseau, sur une composition de Fred Désir, dans un duo avec Jocelyne Béroard. Comment s’est passée cette collaboration ?
Pour le titre Yo, tout s’est fait simplement. C’est toujours plus facile de contacter directement un artiste pour réaliser un projet que passer par une major. Avec Jocelyne Béroard, la collaboration s’est faite simplement, basée sur un respect mutuel. C’est quelqu’un qui, du temps de la tournée des Malavoi, il y a longtemps, m’a accompagné. J’étais jeune alors et elle m’a encadré, fait prendre contact avec des gens du métier qui m’ont appris tout ce qu’il fallait savoir. Quand j’ai appelé Jocelyne pour lui proposer le duo, elle m’a dit oui tout de suite. Patrick Chamoiseau m’a donné la version originale du texte. Fred Désir, le compositeur de ce morceau, m’a donné une copie de la partition. J’ai fait l’arrangement. Une collaboration idéale.

Vous revenez en Guadeloupe après cinq ans. La Guadeloupe représente beaucoup pour vous.
La Guadeloupe a toujours été mon deuxième pays, comme je l’ai toujours dit. Ma seconde patrie ! J’aime la Guadeloupe où je suis venu très jeune, en 1992. Il était temps d’y revenir. Cela fait quatre, cinq ans. Je brûle d’envie d’être en Guadeloupe, pour rencontrer tous ceux qui m’ont toujours soutenu. Je leur prépare quelque chose qui va certainement leur plaire : des extraits de mon nouvel album. Ce sera aussi le moment de la mise en vente de cet album, Futur, qui n’est pas encore officiellement en vente en Guadeloupe.

Source: France Martinique


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