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Pétrole en Haiti

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Pétrole en Haiti,
27 mars 2004

Par Dr. Georges Michel,
webzinemaker.com

Depuis des temps immémoriaux, ce n’est un secret pour personne que dans le sous-sol des deux états qui se partagent l’Ile d’Haïti et dans les eaux avoisinantes, il existe d’importants dépôts d’hydrocarbures encore inexploités, on ne sait pourquoi. Déjà au début du XXème siècle , la carte physique et politique de l’Ile d’Haïti, dressée en 1908 par Messieurs Alexandre Poujol et Henry Thomasset, signalait un important gisement de pétrole en Haïti au voisinage de source du Rio Todo El Mondo, Affluent de droite du fleuve Artibonite, plus connu aujourd’hui sous le nom de Rivière de Thomonde. (le mot Thomonde viendrait-il de Todo El Mondo?) le gisement du pétrole en question se trouve à cheval sur la limite entre les arrondissements de Hinche et de Mirebalais, dans une zone montagneuse, située au pied de la chaîne des Montagnes Noires, en direction plein ouest de Thomonde.

La même carte signale un gisement de pétrole dans la plaine dominicaine d’Azua, à une faible distance au nord de la République Dominicaine de la ville d’Azua. D’après les informations dont nous disposons, ce dernier gisement en République Dominicaine avait été mis effectivement en exploitation dans la première moitié de ce siècle il avait produit jusqu’á 60.000 barils de pétrole par jour, puis avait été fermé, ayant été jugé à l’époque ‘insuffisamment rentable’. Toujours pour rester en République Dominicaine, on annonçait qu’en 1982 il avait été découvert en face de cette plaine d’Azua, un immense gisement de pétrole off-shore au large de Barahona, mais que ce gisement avait été laissé inexploité.

Ceux qui ont fait le voyage Port-au-Prince/Santo-Domingo peuvent témoigner que la plaine d’Azua et son littoral ressemble à s’y méprendre à la zone de Vieux-Bourg d’Aquin et du littoral correspondant. Il ya des chances raisonnables qu’il y ait donc des dépots d’hydrocarbures dans la région haïtienne homologue, d’autant que nous sommes laissé dire que dans la plaine des Cayes il y avait des indices géologiques de présence de pétrole, de même que dans la baie des Cayes, entre les Cayes et l’Ile-à-Vache.

Nous nous baignions en 1975 à Cayes-à-l’Eau, quant nous eûmes les pieds souillés par une sorte d’huile noirâtre qui suintait du fond marin. Un pêcheur du lieu nous avait expliqué que c’était chose courante en cet endroit.

Il en fait rapport d’un phénomène similaire dans d’autres régions du pays. Paraît-il en Plaine de Léogane et au pied du Morne-à-Cabrit. On a signalé également la présence de schistes bitumineux dans le Département de la Grand-Anse.

Toujours est-il qu’il existe de nombreux endroits dans notre île (Haïti et République Domincaine) qui présentent tous les critères géoligiques de présence d’hydrocarbures. En Haïti, citons la plaine des Cayes, la plaine de Léogane, la plaine du Cul-de-Sac, la plaine des Gonaïves et la Savane désolée, la Plaine du Nord. L’Ile de la Gonâve et les littéraux correspondants pour les gisements off-shore. Dans cette liste, il ne faut pas oublier le grand bassin sédimentaire haïtien du Plateau Central.

Dans le courant des années 50, la Compagnie Knappen-Tippen-Abbet (surnommée par les populations locales (Compagnie Ti-pain à beurre) avait effectué des forages à la Gonâve, en plaine de Cul-de-Sac, au Plateau-Central et dans la région des Gonaïves. Tous ces forages s’étaient avérés extrêmement prometteurs et les résultats avaient été au-delà des espérances. Cependant, les grosses multinationales pétrolières, dont certaines opéraient en Haïti, avaient fait pression pour que les gisements découverts ne fussent pas exploités. Haïti n’était ni l’Arabie Saoudite ni le Koweit. A une époque où le baril de pétrole brut se vendait un peu plus d’un dollar, et que le Golfe Persique en fournissait à gogo, il n’y avait aucune raison pour ces Compagnies de mettre en exploitation des gisements beaucoup moins rentables, alors que l’ARAMCO faisait la pluie et le beau temps en Arabie, à vil prix, pillant même les précieuses ressources pétrolières de ce royaume.

On garderait les gisements haïtiens ainsi que d’autres gisements en réserve pour le XXIème quand la pactole moyen-oriental se serait tari. C’est ce qui arriva!. Les puits de la Knappen-Tippen-Abbet furent numérotés, soigneusement cadenassés ou scellés avec du ciment et on les oublia.

Les rapports de cette immense campagne de forage ne furent, semble t-il jamais communiqués aux Haïtiens. Pensez-vous, on n’allait jamais remettre à ce ramassis de nègres arriérés des informations qui leurs permettraient de travailler à leur libération économique. Ce serait les rendre trop puissants et donner trop de pouvoir à la petite Haïti.

Les Haïtiens n’avaient qu’a attendre un demi-siècle ou un siècle pour cela. Cependant, la campagne fructueuse de Knappen-Tibben-Abbet donna l’occasion à de nombreuses promotions d’écoles haïtiens, préparant leur certificat d’Etudes Primaires et étudiant dans le manuel de géographie d’Haïti des Frères de l’Instruction Chrétienne, d’apprendre que notre sol possédait des gisements de pétrole, au Plateau Central, et à la Gonâve. Ce n’était pas tombé dans l’oreille d’un sourd…

Il est généralement admis dans tous les milieux pétroliers qu’il existe des gisements d’hydrocarbures dans le sous-sol de l’île d’Haïti, mais ces milieux ne sont pas pressés de les mettre en exploitation, tellement les réserves aisement disponibles et déjà répertoriées sont importantes dans les grandes régions productrices de pétrole du monde. On aura toujours le temps de penser à l’île d’Haïti.

On a cependant failli penser à nous lors de la crise du Golfe quant les gisements Kowetiens, Saoudiens et autres étaient menacés par Saddam Hussein. Si les cubains n’avaient pas fait de grands efforts par eux-mêmes pour mettre leur pétrole en exploitation, personne ne l’aurait fait pour eux à leur place. Si ce n’étaient pas les efforts des Cubains, le pétrole cubain serait logé dans les entrailles de la terre, comme l’est toujours le pétrole haïtien. La balle est dans notre camp…

Si les grandes compagnies ne sont pas intéressées à s’occuper de nous et de notre pétrole, nous aurions pu demander à nos voisins cubains de venir nous aider à exploiter notre pétrole.

Dans leur quête dramatique pour le pétrole, les cubains ont développé une technologie et un savoir-faire dont nous pourrions, en échange de leurs services, céder aux cubains une partie de la production pétrolière nationale et leur donner une part de bénéfices. Une mission de responsables gouvernementaux et d’hommes d’affaires haïtiens devrait partir pour Cuba en ce sens.

La triste affaire de l’embargo international à bien montré que nous devons nous débrouiller tous seuls, et surtout que nous n’avons pas à attendre les O.K. du grand Voisin du Nord pour ce qui touche à nos intérêts vitaux. L’ensemble du corps social a pu voir et bien se rendre compte de la manière dont le Grand Voisin du Nord nous a traités et nous traitera encore à l’avenir. Haïti ne sera sauvée que par les Haïtiens, et par les Haïtiens seuls, c’est la principale leçon de l’embargo.

Si notre pétrole avait été disponible, on aurait pas été forcé de capituler honteusement à la suite du blocus pétrolier décidé au mépris du droit international avec leur infâme résolution 841, par les grandes puissances portant désormais le nom pompeux et ridicule de ‘ communauté internationale’.

Nos responsables, nos grands brasseurs d’affaires, nos économistes ultra-libéraux, nos grands contrebandiers, nos Chicagos-Boys anti-nationaux et autres ruffians, auraient préféré importé de l’air, plutôt que de mettre en exploitation les ressources d’Haïti. Avec un zèle qu’il est difficile à comprendre, ils obéissent au doigt et à l’oeil aux injonctions du FMI et de la Banque Mondiale, et se mettent avec ces deux organismes pour détruire l’économie haïtienne, et en particulier notre précieuse agriculture.

Néanmoins, ils se retrouvent bien attrapés et nous avec, quand pour l’impérialisme, pour satisfaire ses macabres desseins, décide d’imposer un embargo, le dernier embargo (il y en aura peut-être d’autres à l’avenir, qui sait?) a prouvé qu’il faut accéler l’intégration économique avec la République Dominicaine.

Les deux Républiques devraient s’engager par traité à se fournir mutuellement du pétrole quelques que soient les décisions d’une tierce partie. La construction d’un oléoduc transinsulaire, Barahona-Port-au-Prince, pourrait être un élément de cette intégration pétrolière entre les deux pays qui se partagent l’île.

En attendant de pouvoir consommer notre pétrole dont les excédents fournissaient aussi de précieuses devises dont nous avons besoin, il faut augmenter les capacités de stockage de produits pétroliers sur le territoire de la République, et de constituer d’importants réserves stratégiques. L’embargo pétrolier de 1991 est par ailleurs un argument de poids pour la reconstruction de nos chemins de fer.

Dr Georges Michel
27 mars 2004